Sur les bateaux IRC fleurissent les voiles permettant d’améliorer les performances aux allures dites « débridées » dans un range de 50 à 90° du vent réel (selon sa force) et qui viennent remplacer ou s’additionner au foc. La Jauge IRC distingue trois voiles aux caractéristiques spécifiques.
La voile d’avant. Sa surface (HSA) est calculée selon la formule suivante :
HSA = 0.0625 * HLU * (4 * HLP + 6 * HHW + 3 * HTW + 2 * HUW + 0.09)
Les mesures HLU, HLP, HHW, HTW, HUW de la voile d’avant ayant la plus grande surface et HLUmax doivent être déclarées et sont inscrites sur le certificat du bateau, de même que HSA. HSA et HLUmax sont les valeurs maxima permises.La règle 21.7.3 stipule que plusieurs voiles d’avant peuvent être établies simultanément en course en IRC pourvu qu’elles soient mesurées et déclarées conformément à l’Annexe A (définitions des termes et mesures IRC – abréviations).
Le génois volant (ou Flying Head Sail). Sa surface (FSA) figurant à l’inventaire de la jauge IRC depuis deux ans, est calculée selon la même formule que la voile d’avant. La règle 21.7.4.1 stipule que les mesures FLU, FLP, FHW, FTW, FUW, FSFL et FSHW du génois volant ayant la plus grande surface doivent être déclarées et sont inscrites sur le certificat du bateau, de même que FSA qui est la valeur maximum permise. La règle 21.7.5 pointe que Les bateaux ne doivent pas embarquer en course un nombre de génois volants supérieur à celui indiqué sur leur certificat IRC. Il faut également préciser que cette voile doit avoir une largeur à mi-hauteur supérieure ou égale à 62.5% de sa bordure (la limite de la voile d’avant) et que la position de l’ancrage de l’amure est assujettie à la longueur de la bordure selon la formule : STLFHmax (distance entre la position de l’ancrage et la face avant du mât) inférieur à la longueur de la bordure moins 0.25*J (base du triangle avant). Cette formule impose une position du point d’écoute en arrière d’au moins 0.25*J.
Le spinnaker. Sa surface (SPA), quelque soit sa géométrie,symétrique, asymétrique ou de type Code 0 est calculée par la formule suivante :
SPA = ((SLU + SLE)/2) * ((SFL + (4 * SHW))/5) * 0.83
Les mesures SLU, SLE, SFL et SHW du spinnaker à bord ayant la plus grande surface doivent être déclarées.La largeur à mi-hauteur du spinnaker ne doit pas être inférieure à 75% de sa bordure.
La surface calculée de ce spinnaker est inscrite sur le certificat d’un bateau comme étant la SPA maximum autorisée. Le nombre de spinnakers embarqués doit correspondre au chiffre indiqué sur le certificat IRC. Posséder 3 spis à bord engendre 0 taxe, A partir du 4ème spi, une taxe est appliquée d’1 ou 2/000ème. Avec 2 spis à bord , vous être crédité d’une détaxe de 1/000ème et avec 1 seul spi de 2/000ème
L’addition de voiles d’avant
Philippe Baetz, propriétaire du J 112 E Musix : « A la parution des caractéristiques du génois volant, on s’est interrogé avec mon voilier Rémi Aubrun (All Purpose) sur la pertinence de cette voile intermédiaire entre un spi et un foc. On a rapidement abandonné de projet car elle était trop taxée. Alors, nous est venue l’idée d’ajouter une voile d’avant au foc existant. Ses dimensions ne peuvent dépasser celles du plus grand foc, on peut l’amurer à l’extrémité du bout-dehors (qui est très long sur le J) la hisser à la hauteur voulue et ainsi l’employer en addition au foc en place sur l’étai. On double gratuitement de cette façon la surface utile à l’avant. Le but est d’avoir une voile pour des allures débridées, dans des secteurs où le Code 0 ne peut plus être porté. Les angles sont fonction de la vitesse du vent, comme pour le Code 0.Un avis a été demandé au centre de calcul IRC pour savoir si une telle voile serait “taxée”. Réponse négative (et bienvenue). Ainsi toilé, le bateau n’est pas un cotre car le point d’amure de la voile la plus en avant n’est pas l’extrémité de la mesure de J (entre le mat et ce point amure). Avec ce feu vert, la commande est passée à All Purpose pour une voile dans les dimensions du foc max du bateau. Le matériau choisi est un laminé Kevlar à coupe orientée. A l’usage, cette combinaison fonctionne bien, tellement que nous l’avons utilisée bien plus souvent qu’anticipé. Dans les côtiers, nous avons un net avantage de vitesse au débridé. Mais évidemment si le vent adonne, les Code 0 classiques vont plus vite. Pour le moment la voile n’a pas d’enrouleur et l’affalage peut poser problème, surtout en double. A voir pour la prochaine saison ». Cette combinaison n’est pas habituelle par chez nous alors que nos voisins britanniques plus nombreux à naviguer en équipage l’affectionnent quitte à rajouter une troisième voile, comme par exemple un tourmentin hissé sur un bas-étai derrière le foc principal pour exploiter avec profit l’effet de fente à ces trois voiles (sur des bateaux de taille conséquente). La combinaison à deux voiles n’est pas sans rappeler celle couramment employée sur les coursiers au large de l’époque, comme sur Pen Duick VI par exemple combinant reacher/ trinquette ou sur le Glénan (voir image). La géométrie triangulaire (presqu’isocèle) favorise l’efficacité de cette voile d’avant additionnelle IRC car elle permet de lui conserver toute sa puissance au choqué en contrôlant la chute. Il est donc opportun que cette voile d’avant additionnelle soit d’une forme spécifique et non munie de mousquetons pour être enroulée. Ajoutons qu’on peut régler la hauteur d’une voile d’avant comme on veut et donc adapter sa géométrie en fonction de l’angle et de la force du vent. En additionnant la surface des 2 voiles d’avant, on approche celle d’un Code 0 et on peut ainsi moduler la puissance nécessaire en jouant sur leur réglage.
Le génois volant. Oui, mais…
Comme écrit précédemment, le génois volant ne fait pas flores. Nous avons eu toutefois l’occasion d’échanger avec un propriétaire qui s’en dit enchanté, et le fabricant de sa voile. Benoit Fagart est propriétaire de l’Ofcet 32Mispik 2 basé à La Rochelle doté d’un bout-dehors qui dépasse l’étrave d’1.15 m. Sur son précédent bateau, il avait un Code 0 mais n’était pas complètement satisfait, trouvant la voile trop spécialisée et difficile à enrouler en raison de sa grande largeur à mi hauteur, notamment dans la brise. Durant les 3 premières années de l’Ofcet, il a utilisé un spi A3 qui manquait également de polyvalence : « On n’arrivait pas à descendre dans le vent. La voile s’avérait intolérante, nécessitant un réglage permanent, et déventait facilement. J’ai vu ce qui se passait en Figaro 3, j’ai lu l’article de Jean Sans dans la revue 2021 et j’en ai parlé avec Incidence pour en final remplacer ce A3 par 2 voiles : un génois volant et un spi A 5. Le génois volant est conçu au départ pour être hissé au capelage mais il peut aller plus haut grâce à l’usage d’une arbalète. Ce qui évite d’avoir à le « barberiser » avec l’effet néfaste de rentrer la voile. Le génois volant a une surface de 55 m2, je l’ai portée la moitié du temps dans la course 45/5 (qui a duré presque 48h) et j’ai gagné dans ma classe ». Benoît a aussi fait des étincelles à l’Olona Cup. « C’est une alternative au Code 0. Le génois volant fabriqué en D4 est plus polyvalent et on remonte plus près du vent qu’avec un Code 0. Aussi, on tient la voile dans un vent plus soutenu. A moins de 5nds de vent, je la porte à 55° du TWA, et je la conserve jusqu’à 25 nds à 120° TWA. En raison de la diminution du rond de chute comparé au Code 0, qui est un spi rappelons-le, la voile s’enroule plus facilement.» En résumé, Benoît est satisfait de son génois volant malgré une surtaxe IRC estimée à 5/6000ème. Taxe revue à la baisse cette année par le Comité Technique IRC. Arnaud Seité de la voilerie Incidence navigue à bord de l’Ofcet 32 : « Le bateau a besoin de rajouter de la « bâche » quitte à être taxé et de posséder un génois volant permet d’embarquer un spi en plus ». Le maître voilier rochelais explique que sur les nouveaux IRC, type SF 3300, à fort triangle avant, on peut envisager un Code 0 qui s’arrête devant les barres de flèche tout en gardant un allongement intéressant, propice à serrer le vent, mais pas sur des unités comme l’Ofcet 32. D’où le choix d’un génois volant dont la géométrie s’inspire du « gennaker » équipant les Figaro 3, même si jauge IRC oblige, le point d’écoute arrive derrière les haubans et empêche le près « serré ».
Code 0 ou spi asymétrique ?
A voir de récents Code 0 taillés justement pour aller près du vent dans des brises légeres à modérées, on se dit que ce spi très particulier est décidément la panacée, mais les fabricants ne sont décidément pas à cours de ressources et nous sortent de leurs ateliers des A3 ou A5 (spis asy de capelage ou en tête) qui se révèlent diaboliques et sont capables de vous mener aussi près du vent qu’un Code 0. La question se pose alors de faire le bon choix si on ne veut avoir que trois spis à bord et ainsi éviter la taxation du 4ème spi, qui soit dit en passant n’est pas chère payée (1, au pire 2/000ème). Un choix « économique » serait de privilégier le spi asymétrique d’un usage plus polyvalent + 2 autres spis, l’un pour faire du VMG et le troisième d’un grammage et d’une forme plus typés. La raison d’exister du génois volant, dont l’usage se situe entre le foc et le spi asy (voir dessin 1), est précisément que ce n’est pas un spi. Un avantage qui a ses revers en raison de la taxation. Reste la combinaison de plusieurs voiles d’avant qui peut s’avérer payante jusqu’à un certain angle de vent plus limité que pour les autres voiles citées. En double, ca fait quand même beaucoup de manœuvres dans un range de vent réduit ! Il est vrai que quand on aime (gagner), on ne compte pas (ni son énergie, ni l’argent dépensé)…
Le génois volant (ou Flying Headsail)…
- Ne doit pas être équipé de lattes quelques soit leurs types.
- Ne doit pas avoir de têtière rigide
- Peut être déployé ou roulé en utilisant un emmagasineur
- Ne peut pas utiliser de systèmes de réduction de surface.
- Doit avoir une largeur à mi-hauteur supérieure ou égale à 62.5% de sa bordure.
- Sera mesuré comme un foc pour le calcul de sa surface.
- Est taxé en fonction de cette surface et du nombre de génois volants embarqué.
- Doit être amuré dans l’axe du bateau sur le pont ou sur un bout dehors et en avant de l’étai identifié par la mesure de J. Ce point d’amure doit être positionné à une distance maximale calculée à partir de la mesure de sa bordure moins 0.25*J.
- Si cette distance est supérieure au STL (distance entre la face avant du mât et la pointe du bout-dehors) déclaré, le génois volant sera amuré à l’extrémité du bout-dehors.
Crédit photos: © Loïc Madeline & © Cedric Pouligny